samedi 31 octobre 2015

Le deuil - Vincent Delecroix et Philippe Forest

"Le deuil" n'est pas un roman, mais un dialogue philosophique entre deux hommes de pensée sur le chagrin et le néant.

Philippe Forest le connaît bien ce deuil, puisqu'il a perdu sa petite fille il y a des années. Une partie de son oeuvre d'écrivain est marquée par cette perte, on pense notamment à "L'enfant éternel" ou "Tous les enfants sauf un".

Vincent Delecroix est quant à lui un philosophe spécialiste de la religion. Auteur entre autres de "Ce qui est perdu", il est spécialiste de Kierkegaard.

Difficile pour moi de critiquer pareille rencontre et tel dialogue. Ce livre n'a pas pour but de nous remonter le moral ou de nous aider lors d'une perte, mais tout simplement de philosopher, se poser des questions et débattre de ses idées.
C'est un livre qui se lit par petits morceaux, car même si l'écriture n'est pas complexe, chaque questionnement mérite réflection.

Nous parlons d'absence mais aussi de présence. Des différentes approches et manières dont les gens vivent ce deuil. On parle aussi de religion(s), de mythologie, de croyance(s). On aborde Kierkegaard et sa philosophie, les notions d'"absence", de "perte", de "néant" et on conclut avec le "chagrin".

 Je vous retranscris un extrait qui m'a beaucoup marquée :

" Vincent Delecroix : J'aime "chagrin" parce que c'est un mot d'enfance. Il désigne pour moi la vérité du deuil, car ce qui caractérise le chagrin enfantin est précisément d'être, si l'on peut dire, momentanément inconsolable: immédiatement vertigineux et absolument sourd, radical. On le traite comme une petite peine alors que c'est un sentiment infiniment supérieur: le chagrin de l'enfant est un véritable abîme et, même s'il ne dure que trois minutes, il est radicalement insondable. Je repense, encore une fois à Achille. Ce n'est pas une noble et digne peine, une douleur digne et bienséante, c'est un chagrin d'enfant, l'épreuve la plus brutale de la perte. "L'homme est une créature qui a besoin d'être consolée", écrit Blumenberg (dans le soucis traverse le fleuve),et, comme chacun sait, ce besoin de consolation est impossible à assouvir : cette impossibilité, ce n'est pas notre malédiction, mais notre remarquable, peut-être enviable, condition. Que je reste inconsolable : les choses n'en auront que plus de prix!"

Pour résumer, c'est un livre qu'il faut déguster et qu'il faut bien sûr avoir envie de découvrir. Noyé par le chagrin, cette discussion ne sera pas d'une grande aide, mais avec une certaine distance, il nous apporte des réponses (ça dépend de chacun), et nous fait nous poser d'autres questions. Il est facile à lire dans le sens ou le vocabulaire, même spécifique, est aisément expliqué par le contexte. Mais il demande du temps, de l'espace et beaucoup de réflection.

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